vendredi 9 janvier 2015

Paradoxes libanais


Paradoxes libanais
L’Orient-Le Jour
Mardi 19 septembre 2006

·         Au moment où le discours politique d’un Siniora, d’un Saad Hariri ou d’un Joumblatt, correspond à s’y méprendre aux aspirations les plus profondes des chrétiens, en termes de liberté, d’indépendance et de souveraineté, à ce moment donc, des voix s’élèvent au sein de l’opposition pour revendiquer leur part du pouvoir au nom des 75% de l’électorat chrétien supposés acquis à leurs thèses et frustrés d’une véritable représentation politique en proportion de leur nombre. Comble du paradoxe, la revendication émane de ceux-là mêmes qui militent pour l’abolition du confessionnalisme politique. Cela tend à démontrer que si, en politique, l’opportunisme est chose banale, il n’a pas l’air de trop affecter la popularité des sujets à ce type de pathologie. Autrement dit, si l’on peut oser cet emprunt à la terminologie économique, il y aurait en politique une inélasticité de la popularité par rapport à l’opportunisme.
·         Des sources ecclésiastiques ont laissé entendre que les communautés chrétiennes auraient discrètement suggéré à des consulats étrangers de durcir les conditions d’octroi des visas pour endiguer le flux d’émigration des jeunes Libanais. Que l’émigration de nos jeunes soit un mal déplorable, nos évêques ont le droit et même le devoir de le dénoncer à temps et à contretemps. Il n’empêche que l’émigration  est l’une des principales ressources du Liban. Le départ des uns finance le maintien des autres sur le sol de la patrie. Du reste, l’émigration n’est qu’un symptôme du mal, et, en toute circonstance, il vaut mieux s’attaquer aux causes du mal que s’en prendre à ses effets. Quand les conditions de vie rétrécissent désespérément le champ des possibles sous ses pieds, comment empêcher le jeune Libanais de se sentir pousser des ailes ? Sans compter que la politique d’endiguement, loin de freiner l’émigration, ne fait qu’accélérer son mouvement. Il y a certainement autre chose à faire pour un paralytique que lui ligoter les bras.
·         Après que ses armées se furent laissé surprendre par l’Ouest, alors que l’ennemi était attendu à l’Est, Nasser eut la décence d’abdiquer, même pour une courte durée. Cependant que le secrétaire général du Hezbollah réagit, lui, à sa « stupéfiante méprise » en s’accrochant encore plus à ses armes. Il est légitime de sacrifier la partie au bien du tout, la médecine nous en donne tous les jours des exemples. C’est une toute autre chose que de sacrifier le tout au bien de la partie, c’est-à-dire le tout libanais au bien exclusif du Hezbollah, à moins que pour ce dernier, le Liban est lui-même partie d’un tout supérieur, inavouable, qui cependant est sur toutes les lèvres.

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