samedi 3 mai 2025

Barrières douanières : les véritables enjeux

 Barrières douanières : les véritables enjeux

Les barrières douanières élevées par Donald Trump contre le reste du monde soulèvent beaucoup de questions. Loin d’être d’ordre strictement économique, elles touchent principalement à la politique et à la souveraineté nationale proprement entendues.

Economiquement parlant, la division du travail plaide forcément contre les barrières. Nul ne peut nier la pertinence de la théorie des avantages comparatifs ou comparés (comparative advantages) et la spécialisation qui lui est consubstantielle d’une part, et la baisse qui s’ensuit au niveau des prix d’autre part. Or la division du travail, chère aux physiocrates, procède, au niveau mondial, d’une vision idéologique qui entre en conflit avec le réel. Elle repose sur le fondement idéologique que les frontières entre les nations, comme voulait nous en persuader notre professeur de droit international, n’existent pas, ne sont pas naturelles. Comme si les frontières sont exclusivement question de géographie, de topographie ou de relief, et que la nature des choses est composée exclusivement de choses inanimées.

Or « la nature des classiques, remarque le philosophe du droit Michel Villey[1], englobe franchement et sans réserve tout ce qui existe dans notre monde : c’est-à-dire, non pas seulement les objets physiques, matériels (comme la “natureˮ post-cartésienne), mais l’intégralité de l’homme, esprit autant que corps, et les institutions humaines et les institutions sociales : la cité, les groupes familiaux, les groupements d’affaire. Pour Aristote toutes ces choses sont dans la nature. Tandis que pour les modernes adeptes du “contrat socialˮ, la cité est artificielle, surajoutée à la nature par l’invention de l’esprit humain, tout le monde sait que pour Aristote l’homme est “animal politiqueˮ : les ouvrages politiques des hommes sont tout aussi bien naturels que le sont les essaims d’abeilles et autres sociétés animales ».

Aussi dans la nature même des choses humaines, l’art, la convention s’ajoutent-ils à la nature ; et le droit positif complète-t-il le droit naturel. Il est dans la nature même des choses qu’en matière de frontières, l’homme ajoute à la nature en dépit de la part d’arbitraire qui accompagne immanquablement la délimitation des frontières et qui relève, elle, du droit positif.

Et c’est là que la philosophie idéaliste est en opposition avec la philosophie réaliste, les idéologues estimant non pas tant qu’il n’existe pas de frontières que le fait qu’il ne doit pas y en avoir, que les frontières ne doivent pas exister. Affirmation dont le commun des mortels peut constater la vanité. Qu’on l’approuve ou qu’on le déplore, le monde réel est composé de nations délimitées par des frontières.

Et s’il y a des frontières, comme le postule la réalité des choses, il est normal qu’une nation donnée, lorsqu’il y va de sa défense et de sa survie, fasse prévaloir ses intérêts stratégiques et nationaux sur ses intérêts économiques, afin de ne pas dépendre, pour sa subsistance et ses intérêts vitaux, de ses propres ennemis. A condition toutefois que la politique de cette nation ne dégénère pas en un nationalisme « immodéré » ou « exacerbé » contre lequel l’Eglise, plus d’une fois, a mis en garde par la voix de ses Papes.

Carlos HAGE CHAHINE

 



[1] Seize essais de philosophie du droit dont un sur la crise universitaire. Collection « Philosophie du droit » (12), Paris, Dalloz, 1969, p. 52.

samedi 15 février 2025

Le meurtre de Louise, 11 ans

 Si en théorie la vie n'a pas de prix, la réalité est tout autre. Dans la rue, dans le bus, on vous poignarde à mort pour un regard de travers. Selon ses déclarations aux enquêteurs, Owen L., « très en colère, après une dispute avec un joueur en ligne, sortait de son domicile, vêtu de sa doudoune noire dans laquelle se trouvait habituellement selon lui un couteau de type Opinel ». « Son intention, ajoute le procureur Grégoire Dulin, était de voler ou de racketter une personne pour se calmer ». On connaît la suite, le meurtre de Louise, une fillette de 11 ans, à la sortie de l'école et en route pour rentrer à la maison.

Connu pour une tentative de vol en juin 2021 et un vol en février 2022, le meurtrier présumé avait « fait l’objet d'alternatives aux poursuites » (sic), la dernière lui ayant « valu un stage de citoyenneté » (resic), apprend-on au journal de 20h sur France2, le 12 février dernier.

De qui se moque-t-on ?

Au rythme où se succèdent en France les meurtres gratuits, impunis, au mieux, très modiquement payés, la vie n'a plus aucun prix.

Il y a un seul critère pour évaluer le prix de la vie, je n'en connais point d'autre, c'est le prix à payer pour toute atteinte à son encontre.

Carlos Hage Chahine

Zahlé, 14 02 2025